La démocratie tranquillou :

31 mai 2011

Oui, il est vrai ces furieuses bacchanales qui s’annoncent, méritent sans doute quelques précisions.

Suite aux mobilisations du 15-M, dans un contexte d’élections locales en Espagne, des gens dits « ordinaires » ont décidé de prendre la rue et d’installer ici et là des campements sur les places principales de leurs villes. Ils ont agit au mot d’ordre « Démocratie réelle maintenant », semble-t-il pour exprimer le rejet de leur classe politique (bipartisme, corruption, …), et probablement pour dénoncer les politiques qu’ils subissent (Austérité, chômage, précarité, patati patata,…). Voilà maintenant que tous ces gens biens installés, quoique dérangés de temps à autre par la police, se parlent, discutent de leurs problèmes, ils s’organisent aussi ; tout cela sous les saintes espèces de l’indépendance et de l’autogestion. Encore une fois les amis du négatif sont à l’œuvre, les jamais contents sont de retour !

Les nouvelles peinent à faire leur chemin jusqu’en France, Sexy DSK oblige, malgré tout elles suscitent par ci par là un peu d’enthousiasme et c’est ici maintenant qu’un petit compte rendu s’impose.

! Le compte rendu !

Forcément aux premières loges via nos filières transpyrénéennes, nous avons décidé de nous pointer à Bastille après la semaine de boulot pour voir d’un peu plus près ce qui s’y mijotait. Il devait bien y avoir 300-400 personnes, surtout des espagnols, qui selon toutes indications vraisemblables invitaient les gens à se soulever. Oh ! C’était un peu le bazar, il y avait des commissions avant l’AG, un peu à l’imitation de se qui se passe sur la Puerta Del Sol, bref, tout cela était bien confus. D’ailleurs on ne savait pas vraiment s’il s’agissait d’un rassemblement en soutien aux espagnols en Espagne ou bien d’une funeste tentative de contagion. Finalement au terme d’une AG laborieuse (comme souvent en AG), il semble que la 2^e option ait été choisie.

De retour au bercail, on se disait connaissant quelques enfants du pays assoiffés de sang, qu’on pourrait peut-être faire la même chose à Rouen. D’autres ne s’en étaient pas privés. C’est comme ç a qu’on s’est retrouvé à une petite vingtaine devant le théâtre des Arts à bavarder, chacun avec ses motivations qu’il serait bien laborieux de rappeler ici. Quoiqu’il en soit, ce joyeux conciliabule s’est vite rendu compte qu’il était peut-être vain de refaire le monde à partir de quatre demi-douzaines de personnes, et qu’il était fondamental de convoquer un rassemblement plus vaste c’est pourquoi une propagande bien chiadée s’imposait. Un tract de synthèse a été rédigé à cette occasion et imprimé à 4500 exemplaires tout de même (bien évidemment dans le contexte d’urgence sa prose n’est pas forcément bien heureuse, il ne plaira pas à tout le monde par la suite). Le pompon a été décroché par une couverture dans le Paris Normandie du Samedi qui annonçait l’événement.

On lira avec grand intérêt l’article en page 3 : «Christina (sic) manifestera demain ».

Désormais on pouvait s’attendre à accueillir le tout Rouen sur la place de l’hôtel de ville (futur place du peuple, J t’es mignon toi).

Samedi 28 avril :

A l’apogée du rassemblement, il devait y avoir au grand maximum 200 personnes, avec deux blocs bien garnis, les trotskystes d’une part et les autonomes d’autre part, les autres étant compressés entre les deux. Au début ça parlait au mégaphone, en essayant tant bien que mal de faire une présentation générale, chacun interprétant à sa manière l’opportunité d’un tel mouvement. C’est là que je me lance dans l’exercice périlleux de retracer les tendances qui se sont manifestés :

- 1-Si on reste au plus proche du concept initial venu d’Espagne, le mouvement cherche à se réapproprier l’espace public en occupant les grandes places de leur patelain, et en signifiant que les personnes qui le compose ne se reconnaissent plus dans les grands partis, ni dans les grands syndicats. Le mouvement appelle de ses vœux à une refondation/régénération du système démocratique. Revendication d’une démocratie participative/ directe/ avancée. Voilà déjà un premier genre de discussion qui concerne de préférence le courant « citoyenniste/légaliste ».

- 2 -Ensuite on trouve les courants « socialos/gauchos » qui revendiquent des droits supplémentaires, qui dénoncent le système capitaliste, certains sont révolutionnaires d’autres moins. La critique de la crise revient souvent, surtout à propos du système financier. Il y a très peu d’écologie pour l’instant, mais ça viendra à coup sûr.

- 3- Enfin, il y a nos amis les totos qui déconstruisent tous les concepts des autres. Alors forcément ce n’est pas toujours facile de s’entendre. Evidemment la démocratie ça les fait tiquer à mort, ils ne veulent pas de commissions, pas de votes, etc…

Cette typologie, vous vous en rendez bien compte, est éminemment caricaturale, elle suppose donc de faire un petit effort d’imagination pour nuancer tout cela. J’vous ai découpé ça à la hache, j’me sentais pas l’âme du grand savant à lunette.

Bilan et perspective :

Pour conclure cette rencontre au sommet, on s’est mis d’accord pour un autre rendez-vous (le 1^er juin) autour d’un barbecue place de l’hôtel de ville de manière à ramener beaucoup plus de monde. Je crois que c’est sensé inaugurer en grande pompe le début du mouvement. Ce sera l’occasion d’approfondir les débats, surement de manière informelle, autour d’une bonne merguez. Je pense qu’à partir de là les réunions seront quotidiennes (je crois qu’il y a des types qui veulent campés). Si la mayonnaise prend on peut espérer que se structure un corps de revendications communes, ou bien la formation ou l’étoffement de réseaux militants. Oui pour l’instant les gens mobilisés sont pour l’essentiel des encartés ou des gens actifs politiquement. A voir.

Si ça intéresse d’une quelconque manière je pourrais être votre méga reporter dévoué.

Le mouvement se répand sur toute la France, vous trouverez les infos là :